Il est photographe, elle est peintre. Un homme et une femme dialoguent autour du nu féminin, de sa perception en tant que source d'inspiration comme de sa remise en cause en tant qu'objet de création.
Muse, madone, amante, tributaire de son rôle maternel ou encore symbole de liberté et de beauté, la figure de la femme est volontiers représentée dévoilée depuis l’antiquité. Inlassablement cantonné à l'objet de désir, son corps reflète une vision exclusivement masculine jusqu'au XXème siècle. Une image stéréotypée qui peine encore aujourd'hui à se défaire, amplement relayée et ancrée dans nos esprits.
Sous les coups de pinceaux de Joëlle Kem Lika et l’œil de Philip Provily, le nu féminin révèle sa nature vivante, loin de l’objet-sculpture inanimé.
Chez Philip Provily, le corps de la femme ne s’exhibe pas, il se découvre le long d’une courbe ou au détour d’une ombre. Simple beauté qui n’a besoin d’être enjolivé, le nu ne révèle pas son identité. L’absence de visage met l’accent sur le seul langage universel du corps participant à une vision non conformiste de la femme, libérée de tout assujettissement. La lumière naturelle est le seul habit de ces silhouettes, évoquant incontestablement le travail poétique de Lucien Clergue, photographe américain célèbre pour avoir immortalisé en noir et blanc le corps des femmes.
En parallèle, Joëlle Kem Lika peint une femme à son image. Dynamique, pétillante, haut en couleur, elle affronte les éléments avec bravoure et assurance. Sujet de prédilection de l’artiste, les surfeuses incarnent une énergie féminine communicative. Le corps nu en action défie les houles et ne semble pas même avoir besoin d’une planche pour glisser. Cette vitalité se ressent aussi bien dans la représentation de la nudité que dans la façon dont Joëlle Kem Lika appose sa touche. Colorée et puissante, la matière picturale est appliquée au pinceau fin ou épais, parfois tamponnée pour l’écume, jouant ainsi avec les textures et les rendus. Les camaïeux de bleus s’opposent aux tonalités beiges et dorées de la peau bronzée. L’ensemble s’harmonise avec une pointe de psychédélisme émergeant des mouvements de l’eau comme des gestes du corps.
Deux visions du nu féminin entre douceur et dynamisme s’accordent sous le prisme de la vitalité. L’exposition pousse à la réflexion quant au regard que l’on porte sur la nudité féminine et procure une dose vivifiante ! A découvrir à la galerie Kem Lika jusqu’au 31 juillet.
Vernissage 21 mai de 18h à 21h.
Texte : Anne-Laure Peressin